ENMI 2010: Nanomondes et imaginaires de l’hyperminiaturisation

17, mai 2010  |  Publié : Actualités, Events  | 

Nanomondes et imaginaires de l’hyperminiaturisation
(Contribution de l’imaginaire des nanotechnologies au nouveau monde industriel)

14 et 15 décembre 2010
Centre Pompidou, Grande salle

Les entretiens 2010 dans Lignes de temps

Télécharger le programme des Entretiens 2010

S’il faut parler de nouveau monde industriel – au sens où une industrie est en premier lieu un processus de transformation technologique de la matière – , c’est bien avec les nanotechnologies et ce que l’on appelle le « nano-monde » que cela s’impose.

Lorsque Bill Clinton lança la National Nanotechnology Initiative c’était en posant que les technologies d’exploitation et de transformation de la matière à l’échelle nanométrique permettrait d’envisager une nouvelle économie, cependant que l’atteinte des limites à l’exploitation micro-électronique de la matière semblait avérée. La « loi de Moore », aussi sujette à discussion qu’elle puisse être (et ces nouveaux Entretiens en feront un sujet de débat), a mis la microphysique au cœur du développement économique depuis les premiers transistors jusqu’aux microprocesseurs, c’est à dire aux puces électroniques. Et elle montre que loin d’être « immatérielle », l’économie numérique est au contraire extrêmement liée aux technologies de la matière. La micro-électronique est cependant réputée devoir atteindre ses limites à une échéance prochaine. Or, c’est la réduction vertigineuse des coûts de la mémoire électronique qui a permis l’expansion des technologies numériques, en particulier depuis la constitution du world wide web, dont il a résulté une pratique massive d’internet qui a bouleversé les modèles industriels des télécommunications aussi bien que de l’informatique et de l’audiovisuel – et bien au delà : commerce, rapport à l’espace et au temps, savoirs, presse, débat public, etc. C’est d’abord de ce point de vue que la question a été posée de passer d’une industrie de transformation de la matière à l’échelle du millionième de mètre à la nano-industrie, c’est à dire aux matériaux nanostructurés au milliardième de mètre.

Bien au-delà du numérique, ce sont cependant les domaines des matériaux (bâtiment, métallurgie, etc.), de la médecine, des biotechnologies, notamment, qui sont concernés. Tous les domaines du secteur industriel semblent en fin de compte impliqués par ce que l’on décrit parfois comme la nouvelle convergence (après celle de l’informatique, des télécommunications et de l’audiovisuel). Tel est l’enjeu de ce que nous décrirons au cours de ces Entretiens 2010 comme un processus d’hyper-miniaturisation. Ce devenir qui ouvre une série de possibilités inouïes, soulève autant de questions économiques, politiques et épistémologiques. L’hyper-miniaturisation fait passer le monde industriel à l’échelle quantique dont les lois sont tout autres qu’à l’échelle macro-physique (et relèvent d’une « hypermatière », c’est à dire d’un couple énergie/information où l’opposition entre la matière et la forme n’a plus cours : la matière s’y « présente » précisément comme une forme). Et ce que l’on appelle les « nanoparticules » issues de cette hyper-miniaturisation trouble les frontières par lesquelles les organismes vivants se distinguent de leurs milieux extérieurs.

Le changement d’échelle est l’enjeu de nouveaux imaginaires où se projette le « nano-monde » – parmi lesquels on peut distinguer :

  • les imaginaires de l’industrie, et de l’histoire nouvelle qu’elle nous raconte à travers la conquête de la nano-dimension qui permettrait de maintenir ouvertes les possibilités d’innovation industrielle et l’activité économique dans son ensemble ;
  • les imaginaires scientifiques tels qu’ils passent par une technologie de l’imagination (au sens fort de la production d’images) de ce qui, à l’échelle nanométrique, n’est pas visible, et que le microscope à effet de tunnel permet de manipuler, mais aussi de figurer par des artefacts graphiques ;
  • les imaginaires sociaux traversés et surcodés aussi bien par les pratiques littéraires de la science-fiction que par les discours politiques et les débats citoyens – dans un contexte de crise économique et morale mondiale.

Nous faisons aussi l’hypothèse que des imaginaires économiques et politiques nouveaux, tels qu’ils permettraient de projeter et de désirer un avenir technologique et industriel raisonné, réfléchi, débattu et partagé par la société, passe par l’intégration des questions nanotechnologiques avec celles que nous avions soulevées dans les éditions précédentes des Entretiens du nouveau monde industriel : l’innovation ascendante, les technologies relationnelles réticulaires et les objets communicants – opérateurs technologiques qui transforment le monde quotidien en profondeur.
Cette transformation est déjà largement entamée. La quatrième édition des Entretiens du nouveau monde industriel s’efforcera d’intégrer ces questions.

PROGRAMME INDICATIF DES SESSIONS (en cours de finalisation):

Première journée: Mardi 14 décembre 2010

9h30-13h00: Imaginaires industriels et hyperminiaturisation

En partant de la Loi de Moore, premier story-telling mondial, on analysera comment les road-maps, et notamment celles des entreprises liées aux nanotechnologies, structurent le temps de l’innovation en construisant des récits du futur. On examinera dans quelle mesure ces récits font émerger un nouvel imaginaire industriel.

9h30-12h30
Introduction de Bernard Stiegler (IRI)
Intervenants : Sacha Loeve (Paris I), Françoise Roure
(Ministère de l’Industrie)

12h30-13h00
Table ronde animée par Sacha Loeve (Paris I)

14h30-16h30: Imaginaires scientifiques

Les imaginaires scientifiques sont dans le champ des nanotechnologies, une composante en soi de la recherche et héritent de généalogies différentes. Nous proposons d’appréhender ces imaginaires d’une part au travers des objets de laboratoire, médiateurs obligés, et par le vecteur de la production/diffusion des images.

Introduction : Sacha Loeve (Paris I)
Dialogues : Andrew Mayne (Univ. Paris Sud) et Catherine AllamelRaffin (Univ. de Strasbourg)
Christian Joachim (CEMES) et Sacha Loeve (Paris I)
Laurent Gouzènes (Consultant) et Jean-Luc Beylat (Alcatel Bell Labs

17h00-19h00: Imaginaires anthropologiques

L’homme s’est humanisé en se projetant dans des outils. Son évolution s’est faite dans le sens d’une extériorisation de ses différentes fonctions biologiques. Or, les nanobiotechnologies – vecteurs médicamenteux, nano-dispositifs de type biopuce, nano-implants – nous confrontent à une situation inédite : qu’en est-il du sens de l’évolution humaine dès lors que les artefacts investissent le corps ? On s’appuiera sur des recherches en cours pour interroger les représentations de l’homme futur et la prothéticité.

17h00-18h30
Introduction & Modération par Xavier Guchet (Paris I)
Intervenants : Daniela Cerqui (Univ. de Lausanne), José-Alain
Sahel (Institut de la vision), Patrick Couvreur (Collège de France)

18h30-19h00
Table-ronde animée par Xavier Guchet et Bernard Stiegler

Seconde journée: Mercredi 15 décembre 2010

9h30-12h30: Design et outils de représentation

Au delà de la manière dont le récent débat public sur les nanotechnologies piloté par la CNDP a été géré, sur laquelle on pourra revenir, on analysera la façon dont les recherches en nanotechnologies sont devenues un « terrain d’expérimentation » pour construire de nouveaux rapports entre science et société et faire émerger une « société de la connaissance ». Les nanos induisent pour les designers un renouvellement des rapports habituels entre forme et matière. Ce rapport est notamment bouleversé tout d’abord dans le design utilisant déjà des nanoparticules, ou même des micro-surfaces ou micro-peaux mais surtout du fait que le nanomonde ne s’appréhende que par des outils de médiation du réel : instrumentation, discrétisation, représentation de données, simulation, transmodalité .

9h30-10h45
Introduction de Alain Cadix (ENSCI)
Intervenants : Patrick Pajon (Centre de Recherche sur l’Imaginaire), Sylvie Tissot (Quantum design)

11h00-12h00
Projection du film Puissances de dix (1977)
de Charles et Ray Eames
Modération par Jean-Louis Fréchin (ENSCI)
Intervenants : Gilles Belley et Jean-François Dingjian, Designers

12h00-12h30
Modération par Marie-Virginie Berbet, designer
Présentation du travail des élèves designers sur design/nano et
biotechnologies dans le cadre d’un studio expérimental à l’ENSCILes Ateliers

14h00-19h00: Imaginaires politiques et ingénierie du débat public

On analysera ici la façon dont les recherches en nanotechnologies sont devenues un « terrain d’expérimentation » pour construire de nouveaux rapports entre science et société et faire émerger une
« société de la connaissance ». Or, Cap Digital a mis en place un groupe de travail sur l’innovation sociale et se mobilise sur le développement d’outils de gestion et d’échange de connaissances et de débat. Au-delà de la manière dont le débat sur les nanotechnologies a été géré (sur laquelle on pourra revenir), cette session vise à interroger en quoi le débat sur les nanos, mais, plus largement, la question du principe de précaution, nous obligent à repenser les outils de gestion de crise et de débat public ainsi qu’à poser à nouveaux frais la question fondamentale de la confiance (trust)

14h00-16h00
Introduction de Bernard Stiegler
Intervenants : Brice Laurent (Commission Européenne),
Ermelinde Malcotte (Paris X), Philippe Aigrain (Sopinspace)

16h30-18h30
Intervenants : Dominique Boullier (Sciences-Po), Jean Sallantin
(LIRM), Dorothée Benoit (VivAgora)

18h30-19h00
Débat animé par Jean Sallantin

18h30-19h00: Conclusion

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